« Voir, ne pas voir, croire. Qui voit, qui est aveugle ? » Aujourd’hui, nous proclamons le récit de la guérison de l’aveugle de naissance. « Rabbi, qui a péché, lui ou ses parents pour qu’il soit né aveugle ? », demandent les disciples à Jésus, à la sortie du Temple. Jésus répond : « Ni lui, ni ses parents n’ont péché. Mais c’était pour que les œuvres de Dieu se manifestent en lui… » Jésus sort du cercle infernal de l’accusation, et de la recherche de la cause première. Les pharisiens ont des comportements ésotériques et accusateurs. Ils renferment et culpabilisent l’aveugle : « Tu inventes ta propre maladie… » Nos réseaux sociaux ainsi que nos contemporains ont adopté sans modération ce mode de fonctionner pour nourrir une autosuffisance insolente.
Jésus colle au réel de la situation. Il invite les disciples à rencontrer le vécu de l’aveugle de naissance. Quelle perception ont-ils de la situation de la gravité du moment ?
En crachant sa salive sur le sol pour en faire de la boue, puis en appliquant cette boue sur ses yeux, Jésus dit de quel aveuglement souffre l’Homme. Certaines personnes sont aveugles, parce qu’elles ne veulent pas se regarder en face. La réalité leur reste une terre étrangère et cachée. Ainsi, il n’est pas faux de penser que l’aveugle de naissance n’a jamais fait l’expérience de pouvoir voir sa réalité intérieure. Jésus l’invite à regarder cette boue appliquée sur ses yeux, cet humus qui est une invitation à la conversion. Il l’invite à l’humilité, pour enfin voir sa propre existence. Jésus lui rend sa vie ; l’homme se convertit et passe dans l’illumination de son existence.
Ensuite, Jésus l’envoie se laver à la fontaine de Siloë sur le chemin qui reliait la fontaine au Temple de Jérusalem. Chemin très utilisé par les pèlerins qui venaient à Jérusalem à l’occasion des grandes fêtes juives. Ces pèlerins allaient également se purifier dans les eaux du Shiloah, au pied de la montagne de Sion, puis ils montaient au temple pour offrir leurs sacrifices.
La rencontre avec Jésus qui nous purifie et nous nettoie de l’aveuglement intérieur nous invite à nous laver dans l’eau du baptême. Notre rencontre avec Jésus nous illumine. Nous pouvons alors tout voir de nous-mêmes, et en nous-mêmes. Ce bain de la purification ne signifie pas que tout est effacé, ou oublié. Bien plus, il exprime que dans la lumière de Jésus, nous pouvons accepter ce qui est en nous, de notre histoire passée et de nos expériences présentes sans aucun jugement, ni déni, ni condamnation.
Recouvrer la vue devient une renaissance dans la Foi. Alors, croire devient l’expérience, qu’il n’y a rien en nous, que Dieu ne puisse, inconditionnellement, sauver et guérir.
N’est-ce pas le sens de notre Joie et de notre Pâques ? En marche, avec les catéchumènes, avec les pères autour des abbayes, j’existe et je m’accepte dans mon image originale, celle de Dieu en moi. Ma Pâque devient la joie du réveil de ma conscience d’être fils/fille du Père. Ainsi, l’appel du Père illuminant mes ténèbres intérieures me donne de renaître à la Vie, lorsque Jésus me touche les yeux.
Votre curé, Joseph SCHMETZ